Secret bancaire, contrôles fiscaux et liberté d’établissement, quelle est la solution ?
Si l’arrêt rendu par la CJUE manque cruellement d’intérêt juridique substantiel, il n’en est pas pour autant dénué de tout intérêt. Il peut même à certains égards apparaitre relativement excitant. Cet intérêt provient sans doute de l’actualité du sujet traité. Effectivement, l’arrêt met en exergue les tensions dues aux disparités de législations fiscales entre Etats membres et la question du secret bancaire. Or, au milieu se situe l’évasion fiscale, question dont le traitement apparait des plus complexes tant les disparités de législations et la complexité de ces dernières brouillent la frontière entre la notion d’optimisation fiscale (légale) et celle de fraude fiscale (illégale)
En l’espèce, il s’agissait d’un établissement de crédit allemand qui possédait une succursale en Autriche. Or comme le souligne l’avocat général dans ses conclusions, les succursales étrangères de par la soumission à deux législations (Etat d’origine et d’accueil), peuvent subir des entraves dans l’exercice de la liberté d’établissement [1].
En l’occurrence le Bundesfinanzhof demande à la Cour de justice si l’art. 49 TFUE s’oppose à une réglementation allemande imposant, en cas de décès d’un résident, aux établissements de crédit ayant leur siège social sur le territoire de cet Etat, de déclarer les actifs déposés ou gérés auprès de leur succursales non indépendantes établies dans un autre Etats membre et lorsque cet Etat membre ne prévoit pas d’obligation similaire et que les établissements de crédits sont soumis à un secret bancaire sanctionné pénalement. Les « conséquences défavorables » relevées par la Cour pour l’établissement de crédits en l’espèce ne font pas de doutes [2].
La cour indique qu’en dehors de mesures d’harmonisation en matière d’échange d’informations bancaires, un Etat membre peut imposer aux établissements bancaires résidents sur son territoire une obligation d’information aux succursales étrangères. Le fait que cette obligation d’information ne soit pas prévue dans l’Etat de siège des succursales n’est en soi pas un obstacle à une telle législation et ce même si le secret bancaire couvre ces informations dans ce dernier Etat. La liberté d’établissement n’impose en l’occurrence pas aux Etats d’établir des législations fiscales en fonction des autres Etats membres afin d’éviter toute disparité de législation.
En définitive, pour la CJUE, il n’y a pas d’entrave à la liberté d’établissement dans la mesures où les conséquences défavorables constatées sont dues à l’exercice souverain de compétences étatiques en matière de secret bancaire et de contrôle fiscal. Signalons au demeurant que l’Avocat général avait pour sa part constaté une entrave [3].
Seul la coopération bilatérale peu permettre d’éviter ce genre de frottement. En l’occurrence, en 2012 un accord bilatéral Autriche-Allemagne a été conclu, malheureusement cet accord ne pouvait couvrir les faits de l’espèce.
En définitif, cet arrêt souligne (une fois n’est pas coutume) qu’il revient aux Etats, en l’état actuel des compétences communautaires, de veiller aux disparités de législation en matière fiscale.
Notes de bas de page
- Concl. Avocat Général, Point 1
- Points 22 à 25
- Concl. Avocat général, Points 19 et s.