Si souffler n’est pas jouer, renvoyer n’est pas juger : la présentation du cadre factuel dans le cadre de la procédure préjudicielle ne met pas en cause l’impartialité du juge pénale
En vertu d’une demande de décision préjudicielle adressée par une juridiction bulgare (Sofiyski gradski sad) en date du 31 décembre 2014, la Cour de justice de l’Union européenne était amenée à se prononcer sur la compatibilité entre les règles nationales applicables spécifiquement à la procédure pénale et l’article 94 du règlement de procédure de la Cour [2]. On rappellera qu’en vertu de ce dernier, et conformément à sa jurisprudence Telemarsicabruzzo [3], la juridiction nationale est tenue d’indiquer dans sa décision de renvoi les « faits pertinents, tels qu’ils ont été constatés par la juridiction de renvoi ou, à tout le moins, un exposé des données factuelles sur lesquelles les questions sont fondées » ainsi que « la teneur des dispositions nationales susceptibles de s’appliquer en l'espèce et, le cas échéant, la jurisprudence nationale pertinente ». Les dispositions procédurales nationales, telles qu’interprétées par la Cour suprême de cassation, interdisent quant à elles à tout juge saisi d’une affaire de se prononcer publiquement sur celle-ci tant qu’elle est pendante ou d’émettre un « avis provisoire », mais aussi de s’exprimer publiquement à son sujet en se référant aux faits concrets et à leur qualification juridique [4].
La difficulté rencontrée par le juge a quo vient de ce que le ministère public a considéré que la formation de jugement avait émis un avis provisoire en procédant à la détermination des faits et du droit applicable lors de l’exercice d’un premier renvoi préjudiciel [5]. En conséquence, selon le droit national applicable, le ministère public lui demandait de se dessaisir de l’affaire. C’est dans ce contexte que la juridiction a adressé trois nouvelles questions préjudicielles à la Cour de justice. En substance, elle cherche à établir 1) si le droit de l’Union lui impose de se dessaisir après l’exercice d’un renvoi préjudiciel en raison de la présentation à cette occasion du cadre factuel et juridique du litige ; 2) en cas de réponse négative à la première question, si elle peut se prononcer après la décision préjudicielle uniquement sur la base des constatations faites dans la demande préjudicielle et refuser de rouvrir les débats, ou au contraire si elle peut continuer à assembler de nouvelles preuves et à entendre les parties, y compris sur les questions concernées par la demande préjudicielle ; 3) si, enfin, elle peut sans violer le droit de l’Union s’appuyer sur les dispositions nationales offrant un plus haut degré d’exigence en termes d’impartialité pour se dessaisir en considérant que par la demande préjudicielle elle a déjà émis un avis (provisoire ou définitif, selon le sens de la réponse à deuxième question) ?
L’enjeu des trois questions préjudicielles adressées est parfaitement résumé par l’avocat général Yves Bot : « Les modalités prescrites aux articles 267 TFUE et 94 du règlement de procédure de la Cour s’agissant du contenu d’une demande de décision préjudicielle seraient-elles susceptibles de compromettre la garantie des droits consacrés aux articles 47 et 48 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne ? » [6].
La solution adoptée par la Cour de justice se justifie tout d’abord par sa finalité qui consiste, d’un point de vue systémique, à préserver l’effet utile de la procédure préjudiciel (I). Elle s’appuie pour ce faire sur l’affirmation explicite des compétences juridictionnelles que le traité confère aux juridictions nationales (II). Enfin, cette décision a pour effet de mettre à nouveau en exergue les interactions à l’œuvre dans l’application juridictionnelle du droit de l’Union entre les ordres juridiques en interaction (III).
I. Une finalité : l’effet utile de la procédure préjudiciel, clef de voûte du système juridictionnel de l’Union
Préserver l’effet utile du renvoi préjudiciel est une exigence qui se dédouble. Elle implique, d’une part, que les modalités de mise en œuvre de la procédure préjudicielle soient de nature à permettre à la Cour de donner une réponse utile. Elle implique, d’autre part, que les règles nationales ne soient pas de nature à empêcher l’usage effectif de la procédure préjudicielle.
C’est dans le cadre de la jurisprudence Telemarsiccabruzzo précitée que la nécessité de faire figurer dans la demande de renvoi, au minium, une description sommaire des faits et du cadre légal a été explicitée pour la première fois. Cela ne prive pas le juge interne de son pouvoir de déterminer à quel stade de la procédure nationale il doit former le renvoi, puisqu’il conserve la possibilité de mettre en œuvre la procédure préjudicielle avant même d’avoir procédé à la totalité des constatations factuelles et des appréciations en droit [7]. Toutefois, en absence d’éléments de fait et de droit suffisants pour fournir une interprétation utile [8], la Cour de justice opposera l’inadmissibilité manifeste de la question préjudicielle par voie d’ordonnance [9].
A cet égard, dans l’affaire Ognyanov, l’avocat général rappelle que la juridiction nationale est la « seule à posséder une connaissance directe des faits à l’origine du litige », alors que « [c]es éléments sont indispensables pour que la Cour soit en mesure de répondre de manière utile et fiable à la question posée, en appréciant l’ensemble des circonstances de fait et de droit qui caractérisent la controverse » [10]. La connaissance des faits et du cadre légal de l’affaire pendante apparaît donc comme une exigence intrinsèque [11], une condition d’efficacité, du mécanisme de coopération juridictionnel désormais reprise sous l’article 94 du règlement de procédure.
En conséquence, la juridiction bulgare est placée dans une situation difficile : se soumettre aux exigences issues de la jurisprudence Telemarsiccabruzzo, c’est s’imposer en vertu des règles nationales de se dessaisir de l’affaire pendante et par là même priver de toute utilité la procédure préjudicielle (la formation de jugement saisie en second lieu est en effet obligée de reprendre la procédure depuis l’origine sans tenir compte de l’instruction déjà menée). Si la situation est déjà complexe pour une juridiction inférieure, elle devient franchement diabolique pour une juridiction suprême soumise à l’obligation – sauf applicabilité de la théorie de l’acte clair – d’exercer un renvoi préjudiciel en cas de difficulté d’interprétation du droit de l’Union. C’est donc l’effet utile du renvoi préjudiciel qui est en cause, puisque les règles du code de procédure pénale privent en pratique les juridictions internes de toute possibilité de saisine préjudicielle.
Afin de résoudre cette situation, le juge a quo s’est donc adressé à la Cour de justice en lui demandant si le droit de l’Union peut être interprété comme lui imposant lui aussi de se démettre en raison d’une supposée violation du principe d’impartialité. Si l’objectif poursuivi par celui-ci est en réalité de pouvoir écarter les dispositions de droit interne au profit de celles qui régissent la procédure préjudicielle, il faut observer toutefois que l’avocat général comme la juridiction communautaire ont procédé à une reformulation significative de la question posée. En réalité, tous deux ont examiné si les dispositions relatives au renvoi préjudiciel, lues à la lumière des articles 47 et 48 CDFUE, s’opposent au dessaisissement en vertu des règles nationales. Comme nous le verrons par la suite, ce renversement n’est pas sans conséquence.
Au regard de l’angle adopté, la réponse ne faisait aucun doute [12] : avocat général et juridiction se prononcent en faveur de l’inconventionnalité des règles de la procédure pénale. Pour ce faire, l’avocat général poursuit une analyse concrète du respect des principes d’impartialité des articles 6§1 CEDH et 47 CDFUE pour conclure à l’absence de violation : après avoir souligné que la Cour européenne des droits de l’homme juge de manière constante que « le simple fait pour un juge d’adopter des décisions avant le procès ne peut justifier en soi des appréhensions relatives à son impartialité », il constate que dans le cadre de l’affaire C‑554/14 la juridiction a qu’o n’a fait que présenter de simples constatations matérielles, sans même procéder à leur qualification [13]. En conséquence, même à la lumière du droit à un procès équitable et de la présomption d’innocence, il n’y aurait pas de raison valable d’écarter les exigences des articles 267 TFUE et 94 du règlement de procédure, qui doivent primer les règles de droit interne. Est-ce en raison de l’ambiguïté de cette approche qui ne se prononce pas explicitement sur l’hypothèse d’une qualification par la décision de renvoi des faits, en tout cas la Cour choisit de se prononcer sur le terrain abstrait.
Pour cette dernière, c’est la nature même du mécanisme de coopération juridictionnelle qui doit constituer le point de départ de l’analyse : celui est « la clé de voûte du système juridictionnel dans l’Union européenne, [et] a pour but d’assurer l’unité d’interprétation du droit de l’Union, permettant ainsi d’assurer sa cohérence, son plein effet et son autonomie ainsi que, en dernière instance, le caractère propre du droit institué par les traités » [14]. Ainsi, elle en conclut que la règle nationale en cause « porte atteinte aux prérogatives reconnues aux juridictions nationales par l’article 267 TFUE et, par conséquent, à l’efficacité de la coopération entre la Cour et les juridictions nationales instituée par le mécanisme du renvoi préjudiciel » [15].
L’absence de violation du principe d’impartialité est en outre corroborée par l’examen de la deuxième question préjudicielle, dont il ressort que la présentation des faits dans la décision de renvoi n’interdit pas au juge a quo de modifier, après avoir posé une question préjudicielle, l’appréciation des faits et du cadre légal. Dans le silence du droit de l’Union et conformément au principe d’autonomie institutionnelle et procédurale [16], celui-ci est effectivement libre, sous réserve de donner un plein effet à l’interprétation délivrée par la Cour, de rassembler de nouvelles preuves et de continuer à entendre les parties en application des règles procédurales nationales. Si la question n’est soulevée ni par la Cour ni par l’avocat général, il ne fait aucun doute que la juridiction conserve la possibilité de soulever une nouvelle question préjudicielle si la poursuite des débats contradictoires soulève de nouvelles difficultés d’interprétation.
II. Un argument : le renvoi préjudiciel, compétence inhérente à l’office communautaire des juridictions nationales [17]
Si l’on sait de longue date que le renvoi préjudiciel est conçu comme un des « moyens à effet indirect » [18] d’assurer la protection que les particuliers tirent du droit de l’Union, la décision de la Cour illustre le fait que la procédure de coopération juridictionnelle constitue également, pour ne pas dire avant tout, un outil à la disposition du juge national dans son office de juge de droit commun de l’Union. Il semble en effet que ces dernières années la dimension objective ait pris le dessus sur la fonction subjective du renvoi [19]. L’article 267 TFUE confère un titre de compétence, direct et autonome, au bénéfice des juridictions nationales (en conséquence de quoi, il n’est pas nécessaire que soit reprises en droit interne les dispositions communautaires qui fondent et encadrent le renvoi préjudiciel, comme c’est le cas en Bulgarie avec le chapitre 59 de la partie VII du GPK qui constitue selon la doctrine le fondement juridique national du recours au renvoi préjudiciel par les juridictions bulgares [20]). En vertu du principe de primauté, et malgré le principe d’autonomie institutionnelle et procédurale, cette compétence ne peut donc être subordonnée à aucune règle nationale susceptible d’en restreinte l’usage [21]. C’est ainsi parce qu’elle « porte atteinte aux prérogatives reconnues aux juridictions nationales » [22] que la règle de procédure imposant le dessaisissement est jugée contraire au droit de l’Union.
En l’espèce, la règle nationale est « susceptible d’empêcher, sinon de dissuader le juge pénal bulgare de poser une question préjudicielle » [23], car comme l’écrit la Cour, elle risque « d’avoir pour conséquence qu’un juge national préfère s’abstenir de poser des questions préjudicielles à la Cour pour éviter soit d’être dessaisi et d’encourir des sanctions disciplinaires, soit d’introduire des demandes de décision préjudicielle irrecevables » [24].
Le renvoi effectué en l’espèce avait uniquement pour objet d’appuyer le Sofiyski gradski sad qui cherchait à écarter la demande de dessaisissement adressée par le ministère public sur le fondement de la jurisprudence de la Cour suprême de cassation et à éviter de voir se former une action indemnitaire ou disciplinaire contre lui du fait de cette décision. Comme le note l’avocat général, le juge a quo n’avait en effet aucun doute quant à la réponse que donnerait la Cour à la première des questions posée [25]. La décision retenue par cette dernière vient donc à nouveau illustrer le pouvoir que peuvent tirer les juridictions nationales – fussent-elles inférieures – dans l’exercice de la jurisdictio [26].
III. Une illustration : l’application juridictionnelle du droit de l’union, vecteur de l’articulation des ordres juridiques
Au titre de la dernière question préjudicielle, la Cour était amenée à examiner si la juridiction a quo pouvait choisir d’appliquer une règle nationale de procédure de dessaisissement que n’impose pas le droit de l’Union, dès lors qu’elle serait plus favorable pour le justiciable ? Dans cette logique, il n’est plus question d’une obligation de dessaisissement, mais d’un pouvoir que le juge national pourrait exercer afin de faire prévaloir un standard national de protection réputé plus élevé.
La façon de reformuler le problème par l’avocat général ôte à la question toute pertinence : « le droit de l’Union s’oppose-t-il à ce que la juridiction de renvoi applique une règle nationale jugée néanmoins contraire au droit de l’Union » [27] ? Ce faisant, il va – contrairement à la Cour – jusqu’à omettre de préciser que cette possibilité est invoquée « au motif que cette règle garantirait un niveau plus élevé de protection des droits fondamentaux des parties » [28]. Cette reformulation s’appuie sur le fait que la réponse donnée à la première question va plus loin que ce qu’implique sa présentation formelle. En effet, non seulement la Cour et l’avocat général ont indiqué que les dispositions relatives au renvoi préjudiciel n’imposent pas le dessaisissement, mais qu’au contraire elles le proscrivent. Dès lors, la réponse donnée à la première question, dotée en application de l’article 288 TFUE de la force exécutoire, devrait imposer sans aucun doute l’impossibilité pour la juridiction de se dessaisir même volontairement afin que soient garanties « la primauté, l’efficacité et l’unité du droit de l’Union » [29].
Pourtant, il était possible de comprendre autrement – et peut-être plus fidèlement – la question posée, en se demandant si ce qui ne saurait être imposé en vertu d’une règle nationale contraire à l’article 267, peut encore être autorisé en application, non de cette même règle nationale, mais en vertu d’une autre disposition du droit primaire, à savoir l’article 53 de la Charte. Le problème n’est plus alors celui de la possibilité d’exciper du droit de l’Union sur le fondement d’une règle nationale, mais bien de la possibilité d’exciper d’une règle du droit de l’Union (les articles 267 et 94, lus à la lumière des articles 47 et 48 CDFUE, qui interdisent le dessaisissement en raison de la seule présentation du cadre factuel dans la demande de décision préjudicielle) sur le fondement d’une autre règle du droit de l’Union (l’article 53 qui autorise les Etats à faire valoir un standard de protection plus élevé). Même sans identifier de violation des articles 47 et 48 de la CDFUE [30], n’est-il pas possible de voir dans l’application d’une faculté de dessaisissement l’effet d’une conception nationale plus protectrice du droit au juge et de la présomption d’innocence protégée par l’article 53 CDFUE ?
L’interrogation est certainement platonique, car elle n’aurait pas abouti à une réponse différente de la Cour. L’invocation de l’article 53 n’est possible que dans la mesure où elle reste compatible avec la primauté du droit de l’Union [31]. Eu égard aux conséquences des règles procédurales impliquant le dessaisissement sur l’effectivité du renvoi préjudiciel et donc sur les caractéristiques propres du droit de l’Union [32], il ne fait aucun doute que l’article 53 ne pouvait jouer utilement en l’espèce.
On signalera par ailleurs au sujet de l’articulation des ordres juridiques, que la solution adoptée par la Cour de justice dans l’affaire Ognyanov doit très certainement trouver à s’appliquer dans l’hypothèse où le renvoi préjudiciel aurait été effectué non par une juridiction nationale, mais par la juridiction d’un autre Etat membre. En l’espèce, le Sofiyski gradski sad était saisi sur le fondement de la décision-cadre 2008/909/JAI d’une procédure relative à la reconnaissance d’un jugement en matière pénale et à l’exécution, en Bulgarie, d’une peine privative de liberté prononcée par une juridiction danoise à l’encontre de M. Atanas Ognyanov. Indirectement en cause dans cette affaire, c’est donc le fonctionnement de la coopération juridictionnelle dans l’ELSJ qui bénéficierait de la réponse donnée par la Cour de justice. Par extension, on peut ainsi penser que l’autorité requise dans le cadre d’un mandat d’arrêt européen, sur le fondement de la décision-cadre 2002/584/JAI, ne pourrait pas non plus tirer argument de la formation d’une question préjudicielle pour mettre en cause l’impartialité de la procédure dans l’Etat d’émission.
Pour conclure, on soulignera que l’avocat général s’est appuyé pour écarter le risque d’impartialité et étayer l’importance du renvoi préjudiciel sur la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme. Il observe que celle-ci « dans son arrêt Dhahbi c. Italie [33], a consacré, dans la lignée d’une jurisprudence déjà bien établie, l’importance de ce mécanisme en Europe et a entériné définitivement le fait que le renvoi préjudiciel est une compétence essentielle du juge national à tel point que celui-ci ne peut l’exercer d’une façon arbitraire au risque de violer le droit à un procès équitable » [34]. L’exercice du renvoi préjudiciel apparaît ainsi, à la lumière de la jurisprudence relative à l’article 6§1 de la CEDH, comme un élément de l’équité de la procédure que le juge national ne peut refuser de déclencher de manière arbitraire sans violer le droit à un procès équitable. L’avocat général en conclut que « si un juge national devait refuser de procéder à un renvoi préjudiciel au motif qu’il encourt non seulement son dessaisissement, mais également une sanction disciplinaire parce qu’il expose le cadre factuel et juridique de l’affaire, cela constituerait, de manière certaine, une violation de l’article 6 de la CEDH » [35]. Cet argument subsidiaire illustre le fait que les dimensions objective et subjective du renvoi préjudiciel sont largement imbriquées, et l’on ne peut qu’espérer voir les juridictions européennes pleinement reconnaître que le mécanisme de l’article 267 constitue un élément à part entière du droit au juge dans le système juridictionnel de l’Union.
Notes de bas de page
- E. Broussy, H. Cassagnabère, et C. Gänser, « Chronique de jurisprudence de la CJUE », AJDA, 2016, p. 1687-1688. Bvgf.
- Comme l’observe l’avocat général le renvoi préjudiciel ne soulève des problèmes qu’en ce domaine, puisque juridictions civiles et administratives bulgares exercent recourent régulièrement à la coopération juridictionnelle. A l’inverse, en matière pénale, la compétence préjudicielle des juridictions nationales est récente en raison de la limitation prévue à l’article 10§1, du protocole n° 36 sur les dispositions transitoires, annexé au traité FUE pour les actes relevant de la coopération policière et judiciaire en matière pénale antérieurs au Traité de Lisbonne (Y. Bot, conclusions, CJUE, 5 juillet 2016, Procédure pénale c. Atanas Ognyanov, Aff. C-614/14, ECLI:EU:C:2016:111, pt. 13-16).
- CJCE, 26 janvier 1993, Telemarsicabruzzo SpA e.a. c. Circostel, Ministero delle Poste e Telecomunicazioni et Ministero della Difesa, Aff. C-320 à 323/90, Rec. I-393, ECLI:EU:C:1993:26, pt. 6 et 9.
- L’avocat général précise que selon la juridiction de renvoi, « même l’indication la plus insignifiante de la juridiction concernant les faits de l’affaire ou leur qualification juridique relève de cet article [29] et entraîne le dessaisissement de celle-ci » (préc., pt. 81).
- La juridiction a quo avait déjà formé un renvoi préjudiciel sur une question de fonds relative aux possibilités de remise de peine dans le cadre de l’exécution d’une peine privative de liberté lorsqu'une personne condamnée dans un premier Etat membre est transférée dans un second. Si la Cour n’a pas encore statué, l’avocat général a rendu ses conclusions le 3 mai 2016 en faveur d’une compétence exclusive de l’Etat d’émission pour l’appréciation du comportement du détenu antérieurement au transfèrement (Y. Bot, conclusions sur CJUE, procédure pénale c. Ognyanov, Aff. C-554/14, ECLI:EU:C:2016:319).
- Y. Bot, préc., pt. 1.
- Arrêt Ognyanov, préc., pt. 17 : « le choix du moment le plus opportun pour interroger la Cour par voie préjudicielle est de leur compétence exclusive ». La Cour se contente d’observer qu’il peut être opportun que les faits de l’affaire soient établis et les problèmes de pur droit national tranchés au moment du renvoi (voir, par exemple, CJCE, 10 mars 1981, Irish Creamery Milk Suppliers Association e.a., Aff. 36/80 et 71/80, Rec. 735, EU:C:1981:62, pts. 6 et 7 ; et plus récemment, CJUE, 22 juin 2010, Melki et Abdeli, Aff. C-188/10 et C-189/10, Rec. I-5667, EU:C:2010:363, pt. 41).
- Sur l’importance de la connaissance des faits pour le travail de l’interprète, voir O. Dubos, Les juridictions nationales, juge communautaire : contribution à l'étude des transformations de la fonction juridictionnelle dans les Etats membres de l'Union européenne, Paris, Dalloz, 2001, p. 670-671.
- Arrêt Ognyanov, préc., pt. 21. Voir par exemple, cette revue, L’été des ordonnances (d'irrecevabilité) : un peu de ménage dans le prétoire.
- Y. Bot, préc., pt. 45 et 47.
- Y. Bot, préc., pt. 56 : « l’exposé du cadre factuel et juridique de l’affaire au principal est un élément constitutif, sinon essentiel de la demande de décision préjudicielle ».
- Selon l’avocat général, la spécificité de la matière pénale ne pouvait d’ailleurs que renforcer l’importance de la présentation des faits dans un domaine où l’harmonisation et la législation européennes sont encore lacunaires (Y. Bot, préc., pt. 68-69).
- Y. Bot, préc., pt. 83-87.
- Arrêt Ognyanov, préc., pt. 15.
- Arrêt Ognyanov, préc., pt. 25.
- Arrêt Ognyanov préc., pt 29-30, et Y. Bot, préc., pt. 108.
- Y. Bot, préc., pt. 11 : le renvoi préjudiciel appartient aux « prérogatives propres qui leur sont reconnues par le traité FUE ».
- R. KOVAR, « Le droit des personnes privées à obtenir devant la Cour des Communautés le respect du droit communautaire par les Etats membres », AFDI, 1966, Vol. XII, p. 529.
- On rappellera en ce sens que, selon l’avis 2/13, le renvoi préjudiciel a pour but « en instaurant un dialogue de juge à juge [...] entre la Cour et les juridictions des États membres, [...] d’assurer l’unité d’interprétation du droit de l’Union [...], permettant ainsi d’assurer sa cohérence, son plein effet et son autonomie ainsi que, en dernière instance, le caractère propre du droit institué par les traités » (CJUE, Ass. pl., 18 décembre 2014, Projet d’adhésion de l’UE à la CEDH, Avis 2/13, EU:C:2014:2454, pt. 176).
- Il n’est pas impossible de penser que cette reprise se fait en méconnaissance du principe d’immédiateté du droit de l’Union, sur la base duquel la Cour a condamné la reprise par des textes nationaux du contenu de règlements communautaires (voir par exemple, CJCE, 7 février 1973, Commission c. Italie, Aff. 39/72, Rec. 101, ECLI:EU:C:1973:13).
- Certes, la perspective dialogique à l’origine de la jurisprudence Melki et Abdeli (arrêt préc.) pouvait en faire douter, mais ici le rappel est sans ambiguïté.
- Arrêt Ognyanov, préc., pt. 25. De même l’avocat général voit dans les règles de procédure des obligations « empiétant ainsi sur les prérogatives propres qui lui sont reconnues par l’article 267 TFUE et par la jurisprudence de la Cour » (Y. Bot, préc., pt. 94).
- Y. Bot, préc., pt. 94.
- Arrêt Ognyanov, préc., pt. 25.
- Y. Bot, préc., pt. 40.
- Voir, par exemple, CJUE, 5 octobre 2010, Georgio Ivanov Elchinov, Aff. C-173/09, EU:C:2010:581, pt 25 et s.
- Y. Bot, préc., pt. 114.
- Arrêt Ognyanov, pt. 31 (à comparer avec la formulation initiale de la question : « sera-t-il conforme au droit de l’Union que la juridiction choisisse de ne pas poursuivre l’examen de l’affaire et, au lieu de cela, de se dessaisir, parce que la poursuite de cet examen serait contraire au droit national qui garantit un niveau plus élevé de défenses des intérêts des parties et de la justice ? »).
- Y. Bot, préc., pt. 118.
- Y. Bot, préc., pt. 70 et 71.
- Comme l’a montré l’affaire Melloni, la Cour rejette en effet « l’interprétation selon laquelle l’article 53 de la Charte autoriserait de manière générale un État membre à appliquer le standard de protection des droits fondamentaux garanti par sa Constitution lorsqu’il est plus élevé que celui qui découle de la Charte et à l’opposer, le cas échéant, à l’application de dispositions du droit de l’Union », dès lors que cette interprétation « porterait atteinte au principe de la primauté du droit de l’Union » (CJUE, 26 février 2013, Stefano Melloni c. Ministero Fiscal, Aff. C-399/11, ECLI:EU:C:2013:107, pt. 56 et 58).
- Arrêt Ognyanov, préc., pt. 15 : le renvoi préjudiciel a pour objet « d’assurer sa cohérence, son plein effet et son autonomie ainsi que, en dernière instance, le caractère propre du droit institué par les traités ».
- CEDH, 8 avril 2014, Dhabi . Italie, req. n° 17120/09.
- Y. Bot, préc., pt. 31.
- Y. Bot, préc., pt. 101 et 102.