La réforme en matière migratoire : comment le droit européen tente d’encadrer le probatoire ?
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Le nouveau « Pacte sur la migration et l’asile ». En 1999 fut adopté le régime d’asile européen commun, une conséquence du nouvel espace de liberté, sécurité et justice, délimité par les frontières de l’Union européenne en vertu de Traité d’Amsterdam de 1997. Vingt-cinq ans après, à la suite de plusieurs modifications programmatiques pluriannuelles, achevées ou tentées, la politique migratoire a été une nouvelle fois réformée par le biais du « Pacte européen sur la migration et l’asile ». Promis depuis 2020 par la Commission européenne, ce pacte a été voté par le Parlement européen le 10 avril 2024, puis adopté par le Conseil de l’Union européenne le 14 mai 2024. Il met en avant une perspective à quatre piliers sur la politique migratoire : (i) des frontières extérieures sûres, (ii) des procédures rapides et efficaces, (iii) un système efficace de solidarité et de responsabilité, (iv) intégrer la migration dans les partenariats internationaux
Au-delà de cette structure de fond, le pacte se compose d’un ensemble normatif de dix actes : il s’agit soit de modifications du cadre législatif déjà mis en place, e.g. la refonte du règlement Dublin III
Le quart de siècle qui sépare la mise en place du régime d’asile européen commun du nouveau pacte se caractérise par de nombreuses turbulences. D’une part, on a assisté à une forte hausse des flux migratoires sur le territoire de l’Union. Ainsi, en 1999, l’UE-15 a reçu 349.000 de demandes d’asile, soit plus de 19% que l’année précédente
Présenté comme une réforme « historique », le Pacte européen promet une refonte complète du système d’asile et de migration de l’UE, et notamment une amélioration de l’efficacité concrète de procédures d’asile bien plus uniformisées et une répartition plus équitable de la charge migratoire entre les États membres
Pourquoi la migration est-elle (encore) une question si difficile à traiter ? Lesdits obstacles résultent du fait que la migration est, en soi, une question difficile à trancher de nos jours. Dans un premier temps, les données statistiques démontrent une forte croissance du phénomène migratoire. À l’échelle mondiale, les données des 6 premiers mois de 2024 dévoilent que plus de 122,6 millions de personnes sont qualifiées comme des « déplacées de force », dont 8 millions sont demandeurs d’asile ; cette tendance constitue une augmentation de 5%, par rapport à la fin de l’année 2023
Dans un second temps, l’augmentation des flux migratoires entre en conflit avec les tendances nationalistes de certains États. Malgré l’optique solidaire de l’UE
Objectif de l’article. L’enjeu de cet article est de proposer une analyse de la situation du demandeur d’asile, en tant que justiciable, à la lumière des nouveautés introduites en la matière par le Pacte. Dans les procédures d’asile, les preuves des administrés tendent à démontrer non seulement la situation de fait, comme dans toute autre affaire judiciaire, mais aussi à former la conviction du juge concernant la crédibilité du récit du demandeur d’asile. Autrement dit, le statut juridique du demandeur d’asile dépend de sa crédibilité devant le juge compétent et, la crédibilité, elle, résulte en partie des règles du probatoire. On observe ainsi que les notions en jeu sont interconnectées, voire interdépendantes. Or, leur écho sur la situation personnelle du demandeur d’asile est particulièrement notable : l’octroi ou le refus de la protection internationale et les droits qui en découlent. Ainsi, il est nécessaire et pertinent de s’interroger sur la manière dont le droit européen tente d’encadrer le probatoire dans la phase judiciaire de la procédure d’asile. C’est pourquoi on se propose d’analyser la procédure européenne du contentieux de la protection internationale pour examiner les exigences qui en résultent au regard des concepts-clé évoqués supra, notamment le probatoire et la crédibilité. Concrètement, quelles sont les modifications apportées par le nouveau Pacte ? Et est-il possible d’y identifier un progrès sur le plan procédural, que ce soit de la perspective du demandeur d’asile ou, au moins, du juge d’asile ?
Cadre de la recherche. L’analyse se propose de survoler la phase judiciaire de la procédure d’asile. De lege lata, conformément à la directive « procédure »
L’analyse du cadre législatif en vigueur et futur révèle que l’Union européenne a mis en place une modalité normative dont la forme concrète a été progressivement modifiée pour augmenter le degré d’uniformité à l’échelle européenne et, de façon symétrique, réduire la marge d’appréciation des États membres : l’Union a utilisé tout d’abord les directives, mais a choisi, à l’occasion de la réforme, une coopération plus étroite qui se manifeste par l’appel aux règlements dans la matière (I). Ce mécanisme légal/positiviste/normatif ne s’avère pourtant pas suffisant pour couvrir la complexité et la diversité de toutes les situations pratiques qui apparaissent au niveau de l’Union, de sorte que ce système normatif est interprété, voire explicité ou complété par un instrument judiciaire plus flexible : la jurisprudence obligatoire (II).
I. La transformation de la procédure européenne d’asile, de directives aux règlements : une réforme formelle sans impact majeur
L’analyse historique du cadre normatif en matière de migration au sein de l’UE révèle une attention accrue de la part du législateur européen pour l’instrument normatif choisi pour établir sa politique. Règlement, directive ou décision. Plusieurs possibilités, chacune ayant ses caractéristiques. Sachant que la migration est souvent composée d’une multitude des questions sensibles du point de vue politique, économique, sociale, le législateur européen a été attentif et a modelé sa politique en passant d’une approche souple vers une approche plus rigide, autrement dit de directives jusqu’aux règlements. La directive 2001/55/CE du Conseil du 20 juillet 2001 sur la protection temporaire
Ainsi, on s’aperçoit que l’Union européenne limite la marge de manœuvre nationale par le biais de l’instrument choisi. L’article 288 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne souligne d’une manière claire les distinctions notables entre le règlement et la directive : la finalité est la même dans les deux cas, mais les moyens sont régis au niveau européen dans le premier, alors qu’ils sont laissés à l’appréciation des États destinataires dans le second cas. Cette différence influence fortement le probatoire dans le cadre de la procédure judiciaire du recours contre la décision administrative. En effet, dans le contentieux de la protection internationale, le probatoire a comme finalité la démonstration de la crédibilité du demandeur dudit statut.
La crédibilité du demandeur d’asile n’est pas forcément le point central des instruments européens, mais elle représente un élément vraiment essentiel pour l’individu concerné. Certes, il est difficile de décider si le demandeur d’asile peut bénéficier de la crédibilité, car cela fait partie des aspects moins visibles que la gestion même des flux migratoires continus. Toutefois, pour lui, la conséquence est importante, puisque de l’appréciation de sa crédibilité dépend son statut, son abri et son futur.
La perspective européenne sur cet aspect peut être analysée d’une façon chronologique, en observant que l’analyse de la crédibilité est passée, juste comme la politique d’asile, par une époque de directives (A), qui a déclenché le besoin d’un règlement en la matière (B).
A. L’époque des directives
Jusqu’au moment de l’entrée en vigueur des nouveaux règlements, i.e. en principe, le 12 juin 2026, le cadre normatif antérieur au pacte s’applique. Afin de dégager les principes essentiels qui orientent le probatoire, il faut tout d’abord essayer de repérer de manière concertée les bornes législatives qui encadrent la crédibilité.
Devant le juge d’asile : quelles dispositions applique-t-on ? La phase juridictionnelle de la procédure d’asile comporte toute une série de spécificités qui résulte du texte de la directive « procédure » : le recours contre la décision administrative constitue une expression d’un contentieux plénier, ce qui implique un réexamen ex nunc, de facto et de jure.
À cet égard, l’article 46 (3) de la directive « procédure » dispose que « les États membres veillent à ce qu’un recours effectif prévoie un examen complet et ex nunc tant des faits que des points d’ordre juridique, y compris, le cas échéant, un examen des besoins de protection internationale en vertu de la directive 2011/95/UE, au moins dans le cadre des procédures de recours devant une juridiction de première instance ». De ce texte résulte l’exigence d’examiner d’une manière complète et sur la base de l’ensemble des preuves devant cette juridiction le cas du demandeur d’asile. Cependant, la disposition citée ne mentionne aucun indice, ni la moindre indication concernant le probatoire.
Les dispositions de la directive « procédure » concernant la question mentionnée supra sont ainsi complétées par celles de la directive « qualification », plus précisément l’article 4 alinéas (1), (2) et (3).
Dans le premier alinéa de l’article 4, le législateur européen consacre une marge de manœuvre aux États membres concernant la charge de la preuve dans le cadre de cette procédure, en établissant le principe de la coopération entre le demandeur d’asile et les autorités nationales : « Les États membres peuvent considérer qu’il appartient au demandeur de présenter, aussi rapidement que possible, tous les éléments nécessaires pour étayer sa demande de protection internationale. Il appartient à l’État membre d’évaluer, en coopération avec le demandeur, les éléments pertinents de la demande » Sans les appeler des preuves, le législateur de l’UE utilise le terme « élément » pour désigner un concept d’une importance majeure dans le cadre de la procédure.
En outre, le deuxième alinéa de l’article 4 apporte des précisions importantes concernant les éléments de preuve et les thèses probatoires : « Les éléments visés au paragraphe 1 correspondent aux déclarations du demandeur et à tous les documents dont le demandeur dispose concernant son âge, son passé, y compris ceux des parents à prendre en compte, son identité, sa ou ses nationalités, le ou les pays ainsi que le ou les lieux où il a résidé auparavant, ses demandes d’asile antérieures, son itinéraire, ses titres de voyage, ainsi que les raisons justifiant la demande de protection internationale. »
Enfin, l’article 4 (3) b) de ladite directive constitue un point de repère en matière probatoire dans le sens où le rôle actif du demandeur est vraiment souligné : « Il convient de procéder à l’évaluation individuelle d’une demande de protection internationale en tenant compte des éléments suivants: (...) les informations et documents pertinents présentés par le demandeur, y compris les informations permettant de déterminer si le demandeur a fait ou pourrait faire l’objet de persécutions ou d’atteintes graves ; » les documents apportés par le demandeur constituent donc l’un des critères pour évaluer son statut individuel, d’où résultent les tâches processuelles du demandeur dans cette procédure. À ces documents s’ajoutent les informations à la disposition du juge d’asile.
L’article 4 de la directive « qualification » constitue donc une ligne directrice importante dans cette procédure administrative. Cette disposition consacre le principe de la coopération entre le demandeur et les autorités, tout en instituant l’obligation du justiciable d’étayer sa demande par rapport à toutes les preuves disponibles, ici nommées « éléments ».
La marge de manœuvre octroyée par la directive « procédure ». De manière générale, on peut considérer que les dispositions indiquées sont assez brèves, voire laconiques. Sur le terrain du probatoire, parmi les conditions imposées par la directive, on se propose d’examiner le caractère « effectif » et « complet » du recours. D’une part, la notion d’effectivité s’interprète dans le sens dégagé par la jurisprudence européenne ; d’autre part, la complétude entraîne des conséquences notables en ce qui concerne les thèses probatoires, qui relèvent aussi bien de questions factuelles que de questions juridiques. On observe que le législateur européen ne s’est pas préoccupé, à l’occasion de l’adoption de cette directive, d’autres questions qui pourraient guider les autorités judiciaires. L’évocation dans l’article 46 (4) de la directive du principe de l’autonomie procédurale, pierre angulaire au niveau de l’Union
Les caractéristiques de cette voie de recours ont par la suite été éclaircies par la Cour de Luxembourg dans l’affaire Alheto du 25 juillet 2018 et réaffirmées par la suite
Les caractéristiques du recours sont essentielles pour le juge d’asile car elles répondent presque complètement à la question « comment faut-il juger ? ». Ainsi, pour que la procédure soit effective, selon la Cour de Luxembourg, il faut qu’elle soit complète et ex nunc. Cependant, une question subsiste puisque les éclaircissements de la Cour n’indiquent pas les ressources à utiliser afin de décider du statut juridique du demandeur.
Enfin, l’article 10 de la directive « procédure » doit être évoqué car il détaille les sources d’information que le juge d’asile peut utiliser. Bien que ledit article ne fasse pas partie du chapitre dédié à la voie de recours, il est néanmoins applicable à la procédure judiciaire puisqu’il figure dans le deuxième chapitre consacré aux principes de base et garanties fondamentales.
D’un côté, cet article 10 dispose, dans son alinéa 3 a), que les États membres veillent à ce que « les demandes soient examinées et les décisions soient prises individuellement, objectivement et impartialement ». Cette exigence semble plus utile dans la phase administrative que dans la phase judiciaire, car cette dernière, en raison du caractère juridictionnel du procès, fait en sorte que ces particularités sont présumées.
D’un autre côté, l’alinéa 3 b) du même article impose aux États membres l’obligation de s’assurer que « des informations précises et actualisées soient obtenues auprès de différentes sources, telles que le Bureau européen d’appui en matière d’asile et le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés ainsi que les organisations internationales compétentes en matière de droits de l’homme, sur la situation générale existant dans les pays d’origine des demandeurs et, le cas échéant, dans les pays par lesquels les demandeurs ont transité, et à ce que le personnel chargé d’examiner les demandes et de prendre les décisions ait accès à ces informations ». Cet accès est également rendu possible pour la procédure de recours par les autorités administratives qui décident en première instance, en vertu de l’alinéa 4 de l’article cité. Sont ainsi énoncées des documents issus d’autres entités, même extra-européennes, qui doivent être attentivement examinés par le juge d’asile. De ce fait, résulte une obligation plus claire d’information qui incombent aux entités nationales. La Cour de Luxembourg a noté dans sa jurisprudence que les autorités concernées doivent prouver un haut degré d’attention au regard de développements sociaux à l’échelle mondiale
L’apport de l’article 10 alinéa 3 de la directive « procédure » est assez important puisqu’il consacre la responsabilité des autorités, y compris le juge d’asile, de s’informer auprès de sources officielles pour résoudre l’espèce d’une manière attentive, c’est-à dire suite à une analyse individuelle, objective et impartiale.
Ainsi, la directive « procédure » présentant un cadre insuffisant pour le juge d’asile, celui-ci doit donc également se rapporter à la directive « qualification ». Lorsque plusieurs dispositions régissent un certain domaine juridique, e.g. droit de la famille, droit des sociétés, une codification de tous textes applicables serait une méthode de simplifier les attributions des juristes concernés (juges, avocats etc.) et aussi des parties impliquées. De la sorte, une telle collection de textes ou, voire, un seul acte normatif comprenant tous les stipulations applicables, notamment un « code », pourrait constituer un avantage. Sans demander les exigences d’une codification au niveau européen en matière du contentieux d’asile, les textes pertinents apparaissent comme disparates, d’où la difficulté de les recueillir, les comprendre et les appliquer. Ainsi, résulte un effort supplémentaire d’une part, pour le demandeur d’asile en tant que justiciable et, d’autre part, pour le juge d’asile en tant qu’autorité décisionnelle : pour qu’ils restent mis à jour quant aux nouveautés législatives et jurisprudentielles en matière, le demandeur d’asile et le juge d’asile doivent rechercher tous les textes applicables ainsi que les arrêts applicables de la Cour de Luxembourg et de Strasbourg. Pour combler cette possible carence, les États membres ont transposé les directives en créant des blocs législatifs compacts, e.g. le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en France
La contribution de la directive « qualification ». La directive « Qualification » apporte plusieurs indications en matière probatoire. Premièrement, la charge de la preuve peut appartenir au demandeur d’asile. Deuxièmement, le concept de preuve trouve son écho européen dans la notion d’« élément ». Sur ce point, les éléments sont limités aux déclarations du demandeur ainsi qu’aux documents dont il dispose. Autrement dit, les preuves essentielles ne couvrent pas les témoignages ou d’autres opinions d’experts
Par conséquent, pour décider d’une demande d’asile, le juge d’asile doit se référer aux deux directives fondamentales en la matière et jouer un rôle actif en se renseignant sur la dynamique de la scène internationale. Toutefois, on constate que les indications mentionnées ne fournissent aucun indice au juge d’asile en matière de crédibilité. Si la procédure pénale est guidée par la présomption d’innocence, est-il possible d’en identifier une comparable sur le terrain de la procédure d’asile ?
L’apport supplémentaire du soft law – un repère plus précis ? Puisque le droit national ne peut pas s’éloigner des finalités imposées par le législateur européen, la possibilité d’enrichir le cadre procédural apparaît comme une possibilité assez réduite. Toutefois, les juridictions internationales, par exemple la Cour européenne des droits de l’homme, ne connaissent pas ce type de limite. En effet, dans son analyse, la Cour de Strasbourg fait appel assez souvent au droit comparé ou aux instruments sans force contraignante, comme les instruments de type soft law
Vu son approche, en vertu de l’argument d’autorité, il nous semble logique de s’intéresser aussi sur l’utilité potentielle de ce type d’instrument.
Dans un ordre chronologique, il faut mentionner le Guide des procédures et critères à appliquer pour déterminer le statut de réfugié et principes directeurs sur la protection internationale au regard de la Convention de 1951 et du Protocole de 1967 relatifs au statut des réfugiés
De plus, sont aussi prises en compte les dispositions du paragraphe 196 dudit Guide qui consacre la répartition de la charge de la preuve
De plus, la Cour de Strasbourg a pris en considération la Note de l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés de 1998 sur la charge et le critère d’établissement de la preuve dans les demandes d’asile (« Note on Burden and Standard of Proof in Refugee Claims »)
Finalement, la Cour de Strasbourg a utilisé dans son raisonnement le Rapport de l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés « Beyond Proof; Credibility Assessment in EU Asylum Systems » du mai 2013
Selon ces instruments de soft law, il résulte que la procédure d’asile doit prévoir un assouplissement de la rigidité du probatoire et instituer une responsabilité commune pour déceler les faits ; ainsi, la crédibilité du demandeur peut être établie suite à un récit fidèle des faits allégués.
La Cour de Strasbourg et la Cour de Luxembourg se sont donc référés à des instruments soft law afin d’apporter plus de clarté quant à l’examen des conduites des autorités nationales. De ce fait, les règles ainsi dégagées sont pleinement applicables lors de la procédure judiciaire qui se déroule devant les juridictions de première instance dans les États membres, puisque le cadre européen ne contient pas de particularités applicables dans la matière du probatoire. Par conséquent, le « bénéfice du doute » pourra d’une manière raisonnable être octroyé au demandeur d’asile, comme le Guide des procédures des Nations Unies l’explique
L’attitude réservée du législateur européen concernant les indications qui visent la crédibilité du demandeur d’asile sont critiquables, voire regrettables. Le volet procédural est assez peu réglementé au sein de l’UE et, selon nous, exige une plus étroite coopération et un régime plus uniforme. D’où les raisons qui fondent et les attentes qui entourent le nouveau pacte.
B. Le besoin d’un règlement
Dans sa lettre de 14 octobre 2024 adressée au Parlement européen, la présidente de la Commission européenne, Mme. Ursula von der Leyen, propose 10 points d’action en soulignant la dimension pressante et urgente de la question migratoire au sein de l’UE
Presque une codification ? Malheureusement ou pas, le nouveau pacte ne constitue pas une codification susceptible de faciliter le travail du juge d’asile. En vérité, à partir de leur moment d’application, le juge saisi d’une demande d’asile devra mettre en pratique deux instruments normatifs, i.e. le règlement « procédure » et le règlement « qualification ». Il se trouve en effet que le pacte régit une série d’aspects vraiment complexes et diverses. Complexes, en raison du caractère sensible de la question migratoire : les États membres ont des approches domestiques particulières en ce qui concerne la migration, ouverte ou plutôt fermée, donc il est difficile d’arriver à une perspective entièrement commune et de l’imposer par le biais d’un acte normatif européen, tel que le règlement. Et aussi diverses : à partir de la désignation de l’État membre compétent à résoudre la demande de protection internationale, qui sera encore régie par un règlement, jusqu’aux conditions d’accueil, qui resteront aussi régies par une directive. De ce fait, on observe que l’objet de la réforme est assez étendu, d’où la difficulté, voire l’impossibilité, de réaliser une codification, c’est-à dire un recueil structuré et uniforme de ces dispositions légales. En conséquence, le Pacte apporte des nouveautés visant le contenu des textes adoptés, mais n’apporte pas (et n’en peux pas) une réelle codification de la procédure européenne du contentieux de la protection internationale.
Quelle solution pour promouvoir une véritable « une politique commune » ? L’article 78 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne fait référence à la « politique commune ». Pour atteindre ce but, le cadre législatif commun n’en suffira pas. Selon la doctrine du droit international de la migration, la législation commune ne constitue qu’un premier pas vers une politique commune. Pour achever une politique commune, au cadre normatif s’ajoutent d’autres éléments d’une portée significative qui renforcent l’esprit communautaire, notamment les objectifs, l’implémentation, le financement, la position par rapport aux pays-tiers
« Procédure ». Fait partie du pacte le Règlement (UE) 2024/1348
Le pacte a maintenu la topographie des textes visant la procédure judiciaire, en leur établissant un chapitre dédié, notamment le Ve. L’annexe du règlement confirme la correspondance, sur le plan du contenu, entre l’ancien article 46 et l’actuel article 67. Ont été ajoutées deux autres articles : les articles 68, sur la portée de l’effet suspensif, et 69, sur la durée des procédures. Ceux-ci représentent une reprise, voire un développement des dispositions anciennement incluses sous même article.
Le principe fondamental de la procédure devant le juge d’asile a été maintenu dans le même troisième alinéa. De la sorte, sont requises les exigences bien connues concernant le recours pour qu’il soit « effectif » : « un examen complet et ex nunc tant des faits que des points de droit, au moins devant une juridiction de première instance, y compris, le cas échéant, un examen des besoins en matière de protection internationale conformément au règlement (UE) 2024/1347 ». Mais, cette fois-ci, le nouveau texte impose les caractéristiques du recours : il doit être effectif, ce qui suppose un examen complet et ex nunc. On constate donc que ces particularités de la voie de recours ont été préservées et, par le biais de la réforme, imposées. Au lieu de l’expression « les États membres veillent », fut mis en place le terme « prévoit », d’où découle le caractère plus contraignant du texte. Du point de vue procédural, le règlement impose l’interprétation gratuite (alinéa 4) et limite le probatoire dans le sens où les documents qui ne sont pas traduits dans les délais fixés par le juge sont écartés (alinéa 5).
Dans la perspective de notre analyse, on peut donc considérer que le changement est limité, puisque les dispositions anciennes ont été dans leur plupart préservé tel quel. En effet, pour le demandeur d’asile, la modification de l’instrument choisi, le règlement au lieu de la directive, ne constitue qu’une garantie supplémentaire que les particularités de sa voie de recours seront pleinement respectées. Toutefois, quel peut être l’impact du changement, même réduit, pour la crédibilité ?
« Qualification ». Le même style de changements peut être observé dans le cadre de la réforme de la directive « qualification » et sa transformation en le règlement (UE) 2024/1347
Dans ce cas, la topographie des textes a été préservée, ainsi que la numérotation. On remarque toutefois que le langage utilisé démontre un glissement de la responsabilité vers l’Union. Les changements apportés sont mineurs, voire prévisibles : le législateur a ainsi enlevé la marge de manœuvre des États membres et a établi que la charge de la preuve appartient au demandeur d’asile. Par le biais du deuxième alinéa, ont été fusionnés les deux alinéas antérieurs concernant la thèse probatoire et les preuves à apporter, tout en maintenant l’optique de la directive. Quant à la présomption incluse dans l’alinéa final, aucune modification du contenu n’a été apportée. Ces dispositions impliquent que le demandeur d’asile doit faire preuve de diligence et jouer un rôle actif dans son procès, tandis que le juge d’asile doit obéir au triple standard requis sur ce terrain, notamment, le caractère satisfaisant des explications fournies, d’une part, et l’exigence de cohérence et de plausibilité de ses déclarations, d’une autre.
Tous ces constats conduisent à l’idée que l’encadrement ponctuel du probatoire dans le contentieux d’asile n’a pas été soumis aux grandes réformes en matière de crédibilités. Les lignes directrices incombant au juge d’asile restent les dispositions corroborées établies par les nouveaux règlements. Malgré leur nouveauté, ceux-ci n’ont pas introduit de changements notables en ce qui concerne l’évaluation de la crédibilité du demandeur d’asile.
En effet, la marge de manœuvre supprimée formellement par le biais du nouvel instrument choisi demeure pourtant. À plusieurs reprises, dans les deux règlements analysés, le législateur européen a choisi de préserver le droit des États membres de choisir une particularité concrète de cette procédure judiciaire. Tel est le cas, par exemple, en ce qui concerne la durée de la procédure de recours en première instance
Il est notable, et, dans une certaine mesure, prévisible que l’Union européenne ait décidé d’approfondir la coopération dans ce domaine et ait mis en place une solidarité flexible pour les États membres. Cet aspect démontre la volonté de créer une procédure administrative d’asile au niveau européen, comparable à celle mise en place par le règlement Bruxelles I bis en matière de procédure civile. C’est dans l’affaire Bundesrepublik Deutschland (Effet d’une décision d’octroi du statut de réfugié) que la Cour a constaté que « le droit de l’Union en matière de protection internationale ne comporte, en l’état actuel, pas d’obligation expresse pour les États membres de reconnaître de manière automatique les décisions d’octroi du statut de réfugié adoptées par un autre État membre »
L’analyse concrète des textes dévoile que l’optique européenne est quasiment identique à l’ancienne quant à cette question ponctuelle. Cette souplesse a pour conséquence une orientation limitée en ce qui concerne le probatoire et l’examen de la crédibilité. Faut-il encore se rapporter à d’autres sources, comme auparavant, avec la jurisprudence, pour compléter l’analyse.
II. La modulation jurisprudentielle de la procédure européenne de la protection internationale : un repère technique du raisonnement judiciaire et de la protection des droits de l’homme
À l’échelle de l’Union européenne, l’interprétation issue de la Cour de Luxembourg se mêle d’une manière unique à celle résultant de la Cour de Strasbourg. Par rapport à la voie normative, qui implique une certaine volonté politique, cette manière de moduler le bloc normatif est la plus discrète, mais aussi la plus constante. Compte tenu des dispositions de l’article 267 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne concernant la question préliminaire, la fonction de la Cour de Luxembourg est d’interpréter les actes de l’Union ou, le cas échéant, de statuer sur leur validité ; la première fonction est celle qui nous intéresse le plus (A). Par comparaison, c’est bien connu, la Cour de Strasbourg établit la violation ou non-violation de la Convention européenne des droits de l’homme et, dans son raisonnement, apporte de nouvelles contributions à l’interprétation du bloc conventionnel applicable. Bien que le rapport entre les deux hautes juridictions reste encore un débat ouvert, la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme constitue sans doute un repère précieux dans l’analyse des demandes d’asile (B).
A. L’encadrement du raisonnement du juge d’asile par la Cour de justice de l’Union européenne
La Cour de Luxembourg a souligné à plusieurs reprises que, dans la mesure où le devoir probatoire revient au demandeur, les éléments allégués peuvent être confirmés sans support documentaire dans les conditions inscrites dans l’article 4 (5) de la directive. Dans cette hypothèse, la cohérence, la plausibilité et la crédibilité sont des exigences à remplir
Le raisonnement juridique en deux temps. À cet égard, la jurisprudence de la Cour de Justice de l’Union européenne apporte des éclaircissements significatifs. Dans l’affaire de grande chambre du 2 décembre 2014, A. et autres c. Staatssecretaris van Veiligheid en Justitie
En outre, s’agissant de l’affaire, la Cour de justice de l’Union européenne a noté que « Dans le cadre de cette première étape, dans laquelle s’inscrivent précisément les interrogations de la juridiction de renvoi dans chacune des affaires au principal, si les États membres peuvent considérer qu’il appartient normalement au demandeur de présenter tous les éléments nécessaires pour étayer sa demande, celui-ci étant d’ailleurs plus à même d’apporter des éléments de nature à établir sa propre orientation sexuelle, il n’en demeure pas moins qu’il incombe à l’État membre concerné de coopérer avec ce demandeur au stade de la détermination des éléments pertinents de cette demande, conformément à l’article 4, paragraphe 1, de ladite directive (voir, en ce sens, arrêt M., EU:C:2012:744, point 65). »
Les deux étapes mentionnées ont un ordre logique : la question d’établir les faits par rapport au probatoire est prioritaire et le rôle du demandeur d’asile est essentiel.
Les déclarations du demandeur d’asile : un point de départ. C’est dans l’affaire C646/21, K, L contre Staatssecretaris van Justitie en Veiligheid, que la Cour a statué que « les déclarations d’un demandeur de protection internationale ne constituent que le point de départ du processus d’évaluation des faits et des circonstances mené par les autorités compétentes, lesquelles sont souvent mieux placées que le demandeur pour avoir accès à certains types de documents »
Cette approche avait déjà été évoquée dans l’affaire Fathi
Cette affaire vient ainsi réaffirmer la jurisprudence consacrée de la Cour de Luxembourg, qui a souligné l’importance du droit d’être entendu du demandeur d’asile. Ainsi, dans l’affaire M., la Cour a examiné les arguments présentés par un ressortissant rwandais de l’ethnie tutsie qui a demandé l’asile en Irlande, où il menait des travaux de recherche universitaire en matière de crimes de guerre et du génocide. Selon lui, sa famille fut victime du génocide au Rwanda et il a critiqué l’investigation dudit génocide par les autorités nationales. Le manque de crédibilité fut la raison invoquée pour le rejet de sa demande.
Dans son raisonnement, la Cour a rappelé que le respect des droits de la défense constitue un principe fondamental du droit de l’Union dont fait partie intégrante le droit d’être entendu dans toute procédure : « il est aujourd’hui consacré non seulement par les articles 47 et 48 de la Charte, qui garantissent le respect des droits de la défense ainsi que du droit à un procès équitable dans le cadre de toute procédure juridictionnelle, mais également par l’article 41 de celle-ci, qui assure le droit à une bonne administration »
Bien évidemment, les déclarations du demandeur d’asile constituent l’élément probatoire le plus important, dont l’omission ne peut être justifiée qu’exceptionnellement
L’évaluation des faits – une méthode flexible et variable pour une analyse totale. Dans le contexte des violences du régime taliban contre les femmes en Afghanistan, la Cour a statué dans l’affaire AH, FN contre Bundesamt für Fremdenwesen und Asyl que « l’exigence même de procéder à une évaluation individuelle de la demande de protection internationale suppose que les autorités nationales compétentes adaptent les modalités d’appréciation des éléments de fait et de preuve en fonction des circonstances et des caractéristiques propres à chaque demande »
D’une part, il faut souligner les informations obtenues ex officio. À l’occasion de cet arrêt, la Cour a démontré le niveau de diligence imposé aux autorités nationales. Elle a ainsi fait appel aux renseignements les plus récents mis à la disposition par l’Agence de l’Union européenne pour l’asile, notamment son rapport intitulé « Country guidance : Afghanistan », ainsi qu’à la déclaration sur le concept de persécution en raison d’une accumulation de mesures au regard de la situation actuelle des femmes et des jeunes filles en Afghanistan, émise, le 25 mai 2023
D’autre part, il convient de noter que, au moins apparemment, les orientations soft law deviennent un « hard law ». De la même manière, la Cour a plusieurs fois utilisé les orientations non contraignantes issues au niveau des Nations Unies
Par rapport aux ressources utilisées, l’analyse menée par le juge d’asile se définit par le caractère « complet » du recours dans une nouvelle procédure. C’est dans l’affaire Zamestnik-predsedatel na Darzhavna agentsia za bezhantsite que la Cour a ajouté que l’examen mené par l’autorité nationale implique une réévaluation totale des faits, y compris des faits déjà tranchés, d’une manière définitive par le biais d’un autre jugement national, y compris négatif
Sans doute, ces particularités de la procédure peuvent être atteintes dès lors que la coopération entre le demandeur d’asile et les autorités nationales devient concrète. Consacré par l’article 13, alinéa 1 de la directive « procédure », le principe de coopération est, en effet, un devoir légal imposé au demandeur d’asile. Quant à sa portée, la Cour de justice l’a explicité, en statuant que « cette exigence de coopération à la charge de l’État membre signifie dès lors concrètement que, si, pour quelque raison que ce soit, les éléments fournis par le demandeur d’une protection internationale ne sont pas complets, actuels ou pertinents, il est nécessaire que l’État membre concerné coopère activement, à ce stade de la procédure, avec le demandeur pour permettre la réunion de l’ensemble des éléments de nature à étayer la demande. D’ailleurs, un État membre peut être mieux placé que le demandeur pour avoir accès à certains types de documents »
Il résulte sans aucun doute que la jurisprudence de la Cour de Luxembourg apporte des éclaircissements d’une fine technicité ainsi que des astuces procédurales pour les juges d’asile. Ainsi, le juge d’asile doit décider le cas d’espèce par le biais d’un raisonnement juridique en deux temps : l’établissement de faits et leur appréciation juridique. Tout au long de la procédure, le juge d’asile est obligé de respecter les droits de la défense, dont le droit d’être entendu constitue un élément essentiel. Aux informations obtenues directement du demandeur d’asile s’ajoutent les renseignements visant la situation dans les pays d’origine, c’est-à dire sur la scène internationale. Ces dernières sont la responsabilité du juge d’asile qui doit faire preuve d’un rôle actif et les obtenir auprès des agences officielles, tel que l’Agence de l’Union européenne pour l’asile.
Il conviendra d’examiner la contribution mise en avant par la Cour de Strasbourg dont le raisonnement juridique s’inscrit dans un autre paradigme, borné par d’autre coordonnées normatives.
B. La jurisprudence de la Cour de Strasbourg – une consolidation progressive de garanties procédurales
Dégagés pendant les époques successives de la politique commune en matière de migration et d’asile, les principes découlant de la jurisprudence de la Cour de Strasbourg demeurent encore essentiels. Malgré l’apparente large marge de manœuvre octroyée aux États membres en vertu du régime régi par directives, la jurisprudence constituait déjà un véritable encadrement de l’examen juridictionnel. Maintenant, l’apport prétorien préserve son caractère nécessaire et utile grâce à sa fonction, celle de combler les lacunes qui apparaissent en pratique et de couvrir une grande diversité de cas factuels.
Le rôle actif du demandeur – garanti par l’abri de la confidentialité. À cet égard, l’affaire H. et J. c. Pays-Bas
Les faits de l’affaire sont détaillés de façon exhaustive dans le jugement
La Cour de Strasbourg a déclaré la requête irrecevable en observant que les Pays-Bas « avaient non pas simplement le droit mais également l’obligation contraignante de poursuivre les requérants pour tout acte de torture qu’ils pouvaient avoir commis dans un autre pays ». Cette obligation résulte du droit international, plus précisément du fait que les Pays-Bas et l’Afghanistan sont parties à la Convention de 1984 contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, et à la Convention de Genève de 1949 (IV) relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre.
De cette affaire, deux idées importantes se dégagent.
D’une part, la Cour de Strasbourg a observé que les requérants étaient entrés sur le territoire néerlandais de leur plein gré, en demandant la protection internationale de cet État. Ainsi, la Cour a souligné que la charge de la preuve pèse sur les demandeurs d’asile, autrement dit, ils sont obligés de démontrer la véracité de leurs affirmations : « La charge de la preuve leur incombant, la Cour ne trouve rien d’incongru à ce que le gouvernement exige d’eux toute la vérité. La suggestion selon laquelle les déclarations des requérants aux autorités d’immigration ont été obtenues sous la contrainte est donc sans fondement. »
D’autre part, cette affaire met en exergue la portée de la confidentialité obligatoire pendant les procédures d’asile. Ainsi, la Cour a observé que l’obligation de dire la vérité, qui est essentielle pendant la procédure d’asile, trouve un écho « naturel » dans l’obligation des autorités étatiques de préserver la confidentialité : « L'organe gouvernemental subordonné chargé de traiter les demandes d'asile des requérants, le service de l'immigration et de la naturalisation, a promis aux requérants que leurs déclarations seraient traitées de manière confidentielle. La Cour trouve cela naturel. En effet, il est difficile d'imaginer un système d'asile fonctionnant correctement si les demandeurs d'asile n'ont pas l'assurance que leurs déclarations ne seront pas portées à la connaissance des entités ou personnes contre lesquelles ils doivent être protégés. »
Toutefois, la confidentialité due n’est pas absolue puisqu’elle est contrebalancée par les obligations étatiques découlant du droit international. Ainsi, la Cour a statué « qu’une pratique de confidentialité adaptée au traitement des demandes d’asile ne saurait avoir pour effet de mettre les coupables à l’abri d’un châtiment digne de ce nom. Par conséquent, la Cour ne saurait considérer qu’une fois ces déclarations en possession du gouvernement, le vice-ministre de la Justice était empêché par l’article 6 de la Convention de les transmettre au ministère public, autre organe gouvernemental subordonné, pour qu’il les utilise dans le cadre de ses compétences. »
Il résulte de ces observations que le principe de la confidentialité constitue une garantie, voire un encouragement pour que le demandeur d’asile donne une déclaration réelle, authentique, crédible sans craindre pour sa vie comme dans son pays d’origine. Toutefois, ce principe n’est pas absolu ni constitue une immunité pénale puisqu’il permet prioritiser l’intérêt public, lorsque les déclarations dévoilent certains aspects suspects.
Les thèses probatoires – risque individuel et risque général. Après cette affaire, la Cour de Strasbourg a statué en 2016 sur la question des moyens de preuve dans le contexte des procédures d’asile.
C’est dans l’affaire F.G. c. Suède du 23 mars 2016
Les faits du cas d’espèce cité sont détaillés dans le jugement de la Cour
Le motif de sa demande visait son travail en Iran avec des opposants notoires au régime iranien, ainsi que le fait qu’il avait été arrêté et détenu par les autorités à au moins trois reprises entre 2007 et 2009, en raison notamment de ses activités de publication sur le Web. Le requérant a déclaré qu’il avait quitté son pays après avoir découvert que ses locaux professionnels, où il avait gardé des documents politiquement sensibles, avaient été fouillés et que des documents avaient disparu. Le demandeur a ajouté qu’après son arrivée en Suède, il s’était converti au christianisme, ce qui selon lui l’exposait au risque de subir la peine capitale pour apostasie en cas de renvoi en Iran.
Sur le plan procédural, sa demande d’asile a été rejetée par les autorités administratives suédoises, i.e. Migration Board (Migrationsverket), et une décision d’expulsion a été prise à son encontre. Au cours de la phase administrative, le demandeur d’asile a exposé des raisons politiques ainsi que des raisons religieuses, mais a décidé de ne pas fonder sa demande sur sa conversion en estimant que cet aspect constituait une question privée, ce qui a conduit au rejet de sa demande. Par la suite, le demandeur d’asile a formulé un recours contre cette décision auprès du tribunal compétent, i.e. Migration Court (Migrationsdomstolen), en se fondant sur des motifs politiques et religieux ; à l’occasion de l’audience devant le tribunal des migrations, le demandeur d’asile a renoncé aux raisons religieuses invoquées à l’appui de son recours, en estimant que ces motifs constituaient quelque chose de personnel qu’il ne voulait pas banaliser. Son recours a été rejetée et le demandeur a fait appel auprès de la juridiction compétente, i.e. Migration Court of Appeal (Migrationsöverdomstolen), sur la base d’affirmations essentiellement identiques visant son implication politique et sa conversion qui ont été rejetées. La même solution a été adoptée concernant la demande de réexamen formulée.
De cette affaire résulte la perspective de la Cour concernant les obligations des autorités et des parties en ce qui concerne les circonstances à démontrer : « Concernant la charge de la preuve, la Cour a dit dans l’arrêt Saadi (précité, §§ 129-132 ; voir aussi, notamment, Ouabour c. Belgique, no 26417/10, § 65, 2 juin 2015, et Othman (Abu Qatada) c. Royaume-Uni, no 8139/09, § 261, CEDH 2012) qu’il appartient en principe au requérant de produire des éléments susceptibles de démontrer qu’il y a des raisons sérieuses de penser que, si la mesure incriminée était mise à exécution, il serait exposé à un risque réel de se voir infliger des traitements contraires à l’article 3 ; et que lorsque de tels éléments sont soumis, il incombe au Gouvernement de dissiper les doutes éventuels à ce sujet (Saadi, précité, § 129). »
En examinant le droit pertinent de l’Union européenne, la Cour a statué : « il appartient en principe à la personne qui demande une protection internationale dans un État contractant de présenter, dès que possible, sa demande d’asile accompagnée des motifs qui la sous-tendent et de produire des éléments susceptibles d’établir l’existence de motifs sérieux et avérés de croire que son expulsion vers son pays d’origine impliquerait pour elle un risque réel et concret d’être exposée à une situation de danger de mort visée par l’article 2 ou à un traitement contraire à l’article 3. »
La Cour a également fait une distinction entre les demandes fondées sur un risque général par comparaison à un risque individuel.
Ainsi, d’une part, « concernant toutefois les demandes d’asile fondées sur un risque général bien connu, lorsque les informations sur un tel risque sont faciles à vérifier à partir d’un grand nombre de sources, les obligations découlant pour les États des articles 2 et 3 de la Convention dans les affaires d’expulsion impliquent que les autorités évaluent ce risque d’office (voir, par exemple, Hirsi Jamaa et autres, précité, §§ 131-133, et M.S.S. c. Belgique et Grèce, précité, § 366). »
D’autre part, « dans le cas d’une demande d’asile fondée sur un risque individuel, il incombe à la personne qui sollicite l’asile d’évoquer et d’étayer pareil risque. Dès lors, si un requérant décide de ne pas invoquer ou dévoiler tel ou tel motif d’asile individuel et particulier et s’abstient délibérément de le mentionner – qu’il s’agisse de croyances religieuses ou de convictions politiques, d’orientation sexuelle ou d’autres motifs –, l’État concerné n’est aucunement censé découvrir ce motif par lui-même. Toutefois, eu égard au caractère absolu des droits garantis par les articles 2 et 3 de la Convention, et à la situation de vulnérabilité dans laquelle se trouvent souvent les demandeurs d’asile, si un État contractant est informé de faits, relatifs à un individu donné, propres à exposer celui-ci à un risque de mauvais traitements contraires auxdites dispositions en cas de retour dans le pays en question, les obligations découlant pour les États des articles 2 et 3 de la Convention impliquent que les autorités évaluent ce risque d’office. Cela vaut spécialement pour les situations où il a été porté à la connaissance des autorités nationales que le demandeur d’asile fait vraisemblablement partie d’un groupe systématiquement exposé à une pratique de mauvais traitements et qu’il y a des motifs sérieux et avérés de croire à l’existence de la pratique en question et à son appartenance au groupe visé (paragraphe 120 ci-dessus). »
Récemment, cette jurisprudence a été réaffirmée comme fondamentale en la matière, à l’occasion de l’affaire M.A.M. c. Suisse
Cette affaire constitue un développement inédit des principes prétoriens en matière du droit d’asile, un domaine de plus en plus confronté à de nouvelles situations pratiques problématiques. De la sorte, la Cour de Strasbourg a dégagé une distinction importante sur le plan du probatoire : les demandes fondées sur un risque général impliquent une responsabilité plus élevée du juge d’asile pour s’informer correctement alors que celles fondées sur un risque individuel implique un rôle plus actif de la part du demandeur d’asile pour mieux étayer sa demande. De la même manière, cet arrêt met en avant un modèle de dialogue entre les juridictions internationales, la Cour de Strasbourg et celle de Luxembourg, dont la jurisprudence touche, sur certains points, de questions communes
Le principe de coopération. Cette affaire a servi de point de repère pour un autre cas d’espèce de la Grande Chambre de la Cour européenne des droits de l’homme, l’affaire J.K. et autres c. Suède du 23 août 2016
Dans cette dernière affaire, la Cour de Strasbourg a jugé que la mise en œuvre de la décision d’expulsion des requérants vers l’Irak emporterait violation de l’article 3 de la Convention.
De fait, les requérants, un couple marié et leur fils, sont des ressortissants irakiens qui ont demandé l’asile en Suède car, en cas de retour, ils risquaient d’y être persécutés par Al-Qaida parce que l’un des requérants avait, pendant de longues années, travaillé pour des clients américains en étant basé dans un camp des forces américaines en Irak. De 2004 à 2008, les requérants ont été exposés aux graves menaces et violences de la part d’Al-Qaida. Les autorités administratives suédoises ont rejeté leur demande, décision confirmée par la juridiction compétente en matière de recours, au motif que les actes criminels commis par Al-Qaida remontaient à plusieurs années et que le premier requérant avait mis fin à son commerce avec les Américains.
Dans cette affaire, la Cour de Strasbourg a réaffirmé la jurisprudence F.G. c. Suède et a apporté une série de nuances. Elle a notamment souligné que « Pour ce qui est de l’appréciation des éléments de preuve, il est établi dans la jurisprudence de la Cour que « l’existence [du] risque doit s’apprécier principalement par référence aux circonstances dont l’État en cause avait ou devait avoir connaissance au moment de l’expulsion » (F.G. c. Suède, précité, § 115, cité au paragraphe 83 ci-dessus). L’État contractant a donc l’obligation de tenir compte non seulement des éléments de preuve soumis par le requérant, mais aussi de toute autre circonstance pertinente pour l’affaire examinée. »
En outre, en ce qui concerne la charge de la preuve, la Cour a fait valoir qu’il appartient au demandeur d’asile de produire les éléments de preuve nécessaires pour démontrer l’existence d’un risque de se voir infliger des traitements contraires à l’article 3 de la Convention, alors que la tâche de dissiper les doutes qui demeurent, aux autorités nationales. Ainsi, la Cour a établi que « Selon la jurisprudence de la Cour, il incombe aux personnes qui allèguent que leur expulsion emporterait violation de l’article 3 de produire dans toute la mesure du possible des pièces et informations permettant aux autorités de l’État contractant concerné ainsi qu’à la Cour d’apprécier le risque allégué (Said c. Pays-Bas, no 2345/02, § 49, CEDH 2005‑VI). La Cour reconnaît toutefois que pour les demandes de reconnaissance du statut de réfugié, il peut être difficile, voire impossible, pour la personne concernée de produire des preuves à bref délai, spécialement si pareilles preuves doivent être obtenues dans le pays qu’elle dit avoir fui. L’absence de preuves documentaires directes ne peut donc en soi être déterminante (Bahaddar c. Pays-Bas, 19 février 1998, § 45, Recueil 1998‑I, et, mutatis mutandis, Said, précité, § 49). »
L’idée principale qui se dégage de cette affaire est représentée par le principe de la coopération entre le demandeur d’asile et les autorités nationales, auquel s’ajoute l’assouplissement de la charge de la preuve grâce au bénéfice du doute octroyé aux demandeurs d’asile. De la sorte, « La Cour note que l’obligation d’établir et d’évaluer tous les faits pertinents de la cause pendant la procédure d’asile est partagée entre le demandeur d’asile et les autorités chargées de l’immigration. Le demandeur d’asile est normalement la seule partie à pouvoir fournir des informations sur sa situation personnelle. Sur ce point, la charge de la preuve doit donc en principe reposer sur l’intéressé, lequel doit présenter, aussi rapidement que possible, tous les éléments relatifs à sa situation personnelle qui sont nécessaires pour étayer sa demande de protection internationale. (...) Toutefois, les règles relatives à la charge de la preuve ne doivent pas vider de leur substance les droits des requérants protégés par l’article 3 de la Convention. Il est également important de tenir compte de toutes les difficultés qu’un demandeur d’asile peut rencontrer à l’étranger pour recueillir des éléments de preuve (Bahaddar, précité, § 45, et, mutatis mutandis, Said, précité, § 49). »
Par le biais de cette affaire, la Cour de Strasbourg a établi que la procédure administrative d’asile doit être régie par le principe de coopération. Ainsi, la charge de la preuve qui pèse sur le demandeur d’asile est assouplie d’une manière discrète, en instaurant la responsabilité commune du demandeur et des autorités, y compris le juge d’asile.
Les développements jurisprudentiels de la Cour de Luxembourg et de la Cour de Strasbourg mettent en exergue les nombreuses difficultés pratiques qui entravent ou rendent plus problématique le procès délibératif et décisionnel du juge d’asile. La coopération entre le demandeur d’asile et les autorités saisies de sa requête apparaît comme un principe fondamental de cette procédure administrative que les deux juridictions internationales reconnaissent également. Toutefois, l’examen des développements jurisprudentiels dévoile que la Cour de Strasbourg se préoccupe avant tout de la conduite des autorités nationales dans la sauvegarde des droits fondamentaux, dans une optique plus holistique, alors que la Cour de justice a tranché des questions d’ordre plutôt technique, souvent de point de vue procédurale, d’un grand intérêt pour le demandeur, mais aussi pour les autorités concernées.
Conclusion. Il va de soi que le pacte sur la migration et l’asile est une réforme longuement attendue dont le développement a soulevé un effort politique notable. De la même manière, il est encore trop tôt pour évaluer in concreto son impact, puisque l’application dudit paquet législatif est prévue à partir de 2026. Au regard de l’analyse comparative des dispositions abstraites, il en résulte toutefois que la crédibilité du demandeur d’asile en tant que thèse probatoire et le probatoire en tant que moyen de la démontrer comporte un régime presque identique du point de vue du contenu. Seule la forme a été modifiée, en transformant le mécanisme dirigé par des directives en un système reposant sur des règlements. Les principes qui orientent le juge d’asile sont toujours les mêmes, bien qu’insuffisants pour couvrir tous les dilemmes qui puissent apparaître. Par conséquent, les lacunes de la normativité doivent être comblées par l’apport de la jurisprudence, qui vient à son tour moduler le probatoire dans ce type de procédure. Sachant que la procédure judiciaire du demandeur d’asile ne fut pas au cœur de la récente réforme en la matière, il apparaît évident que s’impose, encore et évidemment, l’appel aux développements jurisprudentiels. Les attentes demeurent donc si on se place dans le cadre d’une perspective procédurale : la marge de manœuvre nationale est supprimée dans la plupart des cas. Donc quelle contribution additionnelle le législateur européen apportera-t-il de lege ferenda à l’appui des autorités nationales ?
Notes
- 1. Commission européenne, Pacte sur la migration et l’asile, [en ligne] https://home-affairs.ec.europa.eu/policies/migration-and-asylum/pact-migration-and-asylum_fr (page consulté le 6 janvier 2025)
- 2. Règlement (UE) no. 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l’État membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride (refonte), JO L 180, 29.6.2013, p. 31–59.
- 3. Règlement (UE) no. 603/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 relatif à la création d'Eurodac pour la comparaison des empreintes digitales aux fins de l'application efficace du règlement (UE) no 604/2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'État membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride et relatif aux demandes de comparaison avec les données d'Eurodac présentées par les autorités répressives des États membres et Europol à des fins répressives, et modifiant le règlement (UE) no 1077/2011 portant création d'une agence européenne pour la gestion opérationnelle des systèmes d'information à grande échelle au sein de l'espace de liberté, de sécurité et de justice (refonte), JO L 180, 29.6.2013, p. 1–30.
- 4. Commission européenne, Les dossiers législatifs en bref, [en ligne] https://home-affairs.ec.europa.eu/policies/migration-and-asylum/pact-migration-and-asylum/legislative-files-nutshell_fr (page consulté le 6 janvier 2025)
- 5. La Cimade, Décryptage du Pacte européen sur la migration et l’asile, [en ligne] https://www.lacimade.org/publication/decryptage-du-Pacte-europeen-sur-la-migration-et-lasile/ (page consulté le 6 janvier 2025)
- 6. UNHCR, European Asylum Statistics for 1999, [en ligne] https://www.unhcr.org/news/briefing-notes/european-asylum-statistics-1999 (page consulté le 6 janvier 2025)
- 7. https://ec.europa.eu/eurostat/statistics-explained/index.php?title=Asylum_applications_-_annual_statistics
- 8. Conseil de l’Union européen, Communiqué de presse, le 14 mai 2024, https://www.consilium.europa.eu/fr/press/press-releases/2024/05/14/the-council-adopts-the-eu-s-pact-on-migration-and-asylum/
- 9. DE BRUYCKER (Philippe) « The New Pact on Migration and Asylum: What it is not and what it could have been » in THYM (Daniel), ODYSSEUS ACADEMIC NETWORK (Eds.), Reforming the Common European Asylum System, 2022, Nomos Verlagsgesellschaft mbH & Co. KG.
- 10. UNHCR, Mid-Year Trends 2024, [en ligne], https://www.unhcr.org/mid-year-trends-report-2024 (page consultée le 22 janvier 2025)
- 11. Pour une opinion sur l’inclusivité de l’espace du Conseil de l’Europe, veuillez consulter CLAYTON (Gina), « ‘The Right to have Rights’: the European Convention on Human Rights and the Procedural Rights of Asylum Seekers » in Abass (Ademola)&Ippolito (Francesco), Regional Approaches to the Protection of Asylum Seekers: An International Legal Perspective, Routledge, First Edition, 2014, p. 192.
- 12. Le Monde, Elections européennes : l’extrême droite en force dans les pays fondateurs de l’UE, [en ligne] https://www.lemonde.fr/international/article/2024/06/13/elections-europeennes-l-extreme-droite-en-force-dans-les-pays-fondateurs-de-l-ue_6239225_3210.html (page consultée le 22 janvier 2025)
- 13. Le Monde, La manipulation des élections roumaines, une leçon pour les démocraties, [en ligne] https://www.lemonde.fr/idees/article/2024/12/16/la-manipulation-des-elections-roumaines-une-lecon-pour-les-democraties_6451090_3232.html (page consultée le 22 janvier 2025)
- 14. Statista, Montée de l'extrême droite en Europe - Faits et chiffres, [en ligne], https://fr.statista.com/themes/10062/la-montee-de-l-extreme-droite-en-europe/#topicOverview (page consultée le 22 janvier 2025)
- 15. Directive 2013/32/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 relative à des procédures communes pour l’octroi et le retrait de la protection internationale (refonte), JO L 180 du 29.6.2013, p. 60–95.
- 16. BAULOZ (Céline)&RUIZ (Géraldine), « Refugee Status and Subsidiary Protection: Towards a Uniform Content of International protection » in Reforming the Common European Asylum System: The New European Refugee Law, CHETAIL (Vincent), DE BRUYCKER (Philippe), MAIANI (Francesco) (dir.), Leiden, Brill/Nijhoff, 2016, p. 240-268.
- 17. Directive 2011/95/UE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011 concernant les normes relatives aux conditions que doivent remplir les ressortissants des pays tiers ou les apatrides pour pouvoir bénéficier d’une protection internationale, à un statut uniforme pour les réfugiés ou les personnes pouvant bénéficier de la protection subsidiaire, et au contenu de cette protection (refonte), JO L 337 du 20.12.2011, p. 9–26.
- 18. TUDURACHI (Adelina-Maria), « The Judicial Phase of International Protection in France and Romania: The Rationale for a Specialized Jurisdiction », Revista Themis, 2023, p. 224.
- 19. Directive 2001/55/CE du Conseil du 20 juillet 2001 relative à des normes minimales pour l'octroi d'une protection temporaire en cas d'afflux massif de personnes déplacées et à des mesures tendant à assurer un équilibre entre les efforts consentis par les États membres pour accueillir ces personnes et supporter les conséquences de cet accueil, JO L 212 du 07/08/2001 p. 0012 – 0023.
- 20. Cadiet (Loïc)., « L’autonomie procédurale dans la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne – Réflexions naïves d’un Huron au Palais du Kirchberg » in The 50th Anniversary of the European Law of Civil Procedure (B. Hess, K. Lenaerts dir.), Studies of the Max Planck Institute Luxembourg for International, European and Regulatory Procedural Law, Nomos, 2020, p. 203-234.
- 21. CJUE, Arrêt du 4 octobre 2024, CV contre Ministerstvo vnitra České republiky, Odbor azylové a migrační politiky, C-406/22, ECLI:EU:C:2024:841, pt. 87-90 ; CJUE, Arrêt du 4 octobre 2018, Bahtiyar Fathi contre Predsedatel na Darzhavna agentsia za bezhantsite, C-56/17, ECLI:EU:C:2018:803, pt. 61-65.
- 22. CJUE, Arrêt du 25 juillet 2018, Serin Alheto contre Zamestnik-predsedatel na Darzhavna agentsia za bezhantsite, C-585/16, ECLI:EU:C:2018:584, pt. 111
- 23. CJUE, Arrêt du 25 juillet 2018, Serin Alheto contre Zamestnik-predsedatel na Darzhavna agentsia za bezhantsite, C-585/16, ECLI:EU:C:2018:584, pt. 113.
- 24. JUE, Arrêt du 25 juillet 2018, Serin Alheto contre Zamestnik-predsedatel na Darzhavna agentsia za bezhantsite, C-585/16, ECLI:EU:C:2018:584, pt. 115.
- 25. CJUE, Arrêt du 13 juin 2024, SN, LN v Zamestnik-predsedatel na Darzhavna agentsia za bezhantsite, C-563/22, ECLI:EU:C:2024:494, pt. 77, 81 ; CJUE, Arrêt du 4 octobre 2024, AH, FN contre Bundesamt für Fremdenwesen und Asyl, Aff. jointes C-608/22 et C-609/22, ECLI:EU:C:2024:828, pt. 52.
- 26. Ministère de l’Intérieur et des Outre-mer, Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile - CESEDA, [en ligne]. https://www.immigration.interieur.gouv.fr/fr/Info-ressources/Documentation/Textes-officiels/Code-de-l-entree-et-du-sejour-des-etrangers-et-du-droit-d-asile (page consultée le 16 juin 2023).
- 27. Loi n° 122 du 4 mai 2006 relatif à l’asile en Roumanie, Journal Officiel de la Roumanie, Partie I, n°. 428 de 18 mai 2006.
- 28. Sur l’admissibilité d’un rapport d’expertise psychologique judiciaire visant l’orientation sexuelle du demandeur d’asile, veuillez analyser l’affaire suivante : CJUE, Arrêt du 27 janvier 2018, F contre Bevándorlási és Állampolgársági Hivatal, C-473/16, ECLI:EU:C:2018:36.
- 29. Par exemple, CEDH, Grande Chambre, 23 août 2016, J.K. et autres c. Suède, req. n°. 59166/12, para. 52-54.
- 30. La Cour a fait appel aux Principes directeurs sur la protection internationale no. 1 : La persécution liée au genre dans le cadre de l'article 1A (2) de la Convention de 1951 et/ou son Protocole de 1967 relatifs au Statut des réfugiés HCR/GIP/02/01 Rev.1 : CJUE, Arrêt du 4 octobre 2024, AH, FN contre Bundesamt für Fremdenwesen und Asyl, Aff. jointes C-608/22 et C-609/22, ECLI:EU:C:2024:828, pt. 53.
- 31. United Nations High Commissioner for Refugees (UNHCR), Guide des procédures et critères à appliquer pour déterminer le statut de réfugié et principes directeurs sur la protection internationale, Réédité, Genève, février 2019, [en ligne] : https://www.refworld.org/docid/60ca08ca4.html (page consultée le 23 août 2023)
- 32. Paragraphe 196 du Guide des procédures et critères à appliquer pour déterminer le statut de réfugié au regard de la Convention de 1951 et du Protocole de 1967 relatifs au statut des réfugiés : « 196. C’est un principe général de droit que la charge de la preuve incombe au demandeur. Cependant, il arrive souvent qu’un demandeur ne soit pas en mesure d’étayer ses déclarations par des preuves documentaires ou autres, et les cas où le demandeur peut fournir des preuves à l’appui de toutes ses déclarations sont l’exception bien plus que la règle. Dans la plupart des cas, une personne qui fuit la persécution arrive dans le plus grand dénuement et très souvent elle n’a même pas de papiers personnels. Aussi, bien que la charge de la preuve incombe en principe au demandeur, la tâche d’établir et d’évaluer tous les faits pertinents sera-t-elle menée conjointement par le demandeur et l’examinateur. Dans certains cas, il appartiendra même à l’examinateur d’utiliser tous les moyens dont il dispose pour réunir les preuves nécessaires à l’appui de la demande. Cependant, même cette recherche indépendante peut n’être pas toujours couronnée de succès et il peut également y avoir des déclarations dont la preuve est impossible à administrer. En pareil cas, si le récit du demandeur paraît crédible, il faut lui accorder le bénéfice du doute, à moins que de bonnes raisons ne s’y opposent. »
- 33. United Nations High Commissioner for Refugees (UNHCR), Note on Burden and Standard of Proof in Refugee Claims (Note sur la charge et le critère d’établissement de la preuve dans les demandes d’asile), Genève, 16 Décembre 1998, [en ligne] : https://www.refworld.org/policy/legalguidance/unhcr/1998/en/23696 (page consultée le 23 août 2023)
- 34. United Nations High Commissioner for Refugees (UNHCR), Beyond Proof; Credibility Assessment in EU Asylum Systems », mai 2013.
- 35. United Nations High Commissioner for Refugees (UNHCR), Beyond Proof; Credibility Assessment in EU Asylum Systems », mai 2013, p. 35.
- 36. Paragraphe 204 du Guide des procédures et critères à appliquer pour déterminer le statut de réfugié au regard de la Convention de 1951 et du Protocole de 1967 relatifs au statut des réfugiés : « 204. Néanmoins, le bénéfice du doute ne doit être donné que lorsque tous les éléments de preuve disponibles ont été réunis et vérifiés et lorsque l'examinateur est convaincu de manière générale de la crédibilité du demandeur. Les déclarations du demandeur doivent être cohérentes et plausibles, et ne pas être en contradiction avec des faits notoires. »
- 37. https://www.politico.eu/wp-content/uploads/2024/10/15/October-2024-EUCO-Migration-letter.pdf
- 38. https://www.migpolgroup.com/index.php/2024/10/17/von-der-leyen-migration-letter-short-term-fix-long-term-risks/
- 39. DE BRUYCKER (Philippe) « The New Pact on Migration and Asylum: What it is not and what it could have been » in THYM (Daniel), ODYSSEUS ACADEMIC NETWORK (Eds.), Reforming the Common European Asylum System, 2022, Nomos Verlagsgesellschaft mbH & Co. KG.
- 40. Commission européenne, Pacte sur la migration et l’asile, [en ligne] https://home-affairs.ec.europa.eu/policies/migration-and-asylum/pact-migration-and-asylum_fr (page consulté le 6 janvier 2025)
- 41. TÁNCZOS (Mariann), « The EU’s Answer to the Migration Crisis: The Road to the New Pact on Migration and Asylum » EURÓPAI TÜKÖR: AZ INTEGRÁCIÓS STRATÉGIAI MUNKACSOPORT KÉTHAVONTA MEGJELENŐ FOLYÓIRATA, 2024 (27.1), p. 107-125.
- 42. Règlement (UE) 2024/1348 du Parlement européen et du Conseil du 14 mai 2024 instituant une procédure commune en matière de protection internationale dans l’Union et abrogeant la directive 2013/32/UE.
- 43. En vertu de l’article 3 (11) la « capacité adéquate » constitue la capacité requise à tout moment pour mener la procédure d’asile à la frontière et la procédure de retour à la frontière établie en vertu du règlement (UE) 2024/1349 ou, le cas échéant, une procédure de retour à la frontière équivalente établie en vertu du droit national.
- 44. Règlement (UE) 2024/1347 du Parlement européen et du Conseil du 14 mai 2024 concernant les normes relatives aux conditions que doivent remplir les ressortissants des pays tiers ou les apatrides pour pouvoir bénéficier d’une protection internationale, à un statut uniforme pour les réfugiés ou les personnes pouvant bénéficier de la protection subsidiaire et au contenu de cette protection, modifiant la directive 2003/109/CE du Conseil et abrogeant la directive 2011/95/UE du Parlement européen et du Conseil.
- 45. Article 69 du Règlement (UE) 1348/2024.
- 46. CJUE, Arrêt du 19 mars 2020, PG contre Bevándorlási és Menekültügyi Hivatal,, C-406/18, ECLI:EU:C:2020:216.
- 47. Article 67 alinéa 7 du Règlement (UE) 1348/2024.
- 48. CJUE, Arrêt du 27 septembre 2023, (Abboudnam) Y.K. contre Republika Slovenija, C-58/23, ECLI:EU:C:2023:748 ; CJUE, Arrêt du 9 septembre 2020, JP contre Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides, C-651/19, ECLI:EU:C:2020:681 ; CJUE, Arrêt du 19 mars 2020, LH contre Bevándorlási és Menekültügyi Hivatal, C-564/18, ECLI:EU:C:2020:218.
- 49. CJUE, Arrêt du 18 juin 2024, QY contre Bundesrepublik Deutschland, C-753/22, ECLI:EU:C:2024:524, pt. 56.
- 50. CJUE, Arrêt du 18 juin 2024, QY contre Bundesrepublik Deutschland, C-753/22, ECLI:EU:C:2024:524, pt. 60.
- 51. CJUE, Arrêt du 11 juin 2024, K., L. contre Staatssecretaris van Veiligheid en Justitie, C-646/21, ECLI:EU:C:2024:487, pt. 56.
- 52. CJUE, Arrêt du 2 décembre 2012, A. et autres contre Staatssecretaris van Veiligheid en Justitie, Aff. jointes C-148/13, C-149/13 et C-150/13, EU:C:2014:2406.
- 53. Directive 2004/83/CE du Conseil, du 29 avril 2004, concernant les normes minimales relatives aux conditions que doivent remplir les ressortissants des pays tiers ou les apatrides pour pouvoir prétendre au statut de réfugié ou les personnes qui, pour d’autres raisons, ont besoin d’une protection internationale, et relatives au contenu de ces statuts (JO L 304, p. 12, et rectificatif JO 2005, L 204, p. 24).
- 54. CJUE, Arrêt du 2 décembre 2012, A. et autres contre Staatssecretaris van Veiligheid en Justitie, Aff. jointes C-148/13, C-149/13 et C-150/13, EU:C:2014:2406, pt. 55.
- 55. CJUE, Arrêt du 2 décembre 2012, A. et autres contre Staatssecretaris van Veiligheid en Justitie, Aff. jointes C-148/13, C-149/13 et C-150/13, EU:C:2014:2406, pt. 56.
- 56. CJUE, Arrêt du 11 juin 2024, K., L. contre Staatssecretaris van Veiligheid en Justitie, C-646/21, ECLI:EU:C:2024:487, pt. 57.
- 57. CJUE, Arrêt du 11 juin 2024, K., L. contre Staatssecretaris van Veiligheid en Justitie, C-646/21, ECLI:EU:C:2024:487, pt. 58.
- 58. CJUE, Arrêt du 4 octobre 2018, Bahtiyar Fathi contre Predsedatel na Darzhavna agentsia za bezhantsite, C-56/17, ECLI:EU:C:2018:803, pt. 80, 82.
- 59. CJUE, Arrêt du 4 octobre 2018, Bahtiyar Fathi contre Predsedatel na Darzhavna agentsia za bezhantsite, C-56/17, ECLI:EU:C:2018:803, pt. 81.
- 60. CJUE, Arrêt du 22 novembre 2012, M. M. contre Minister for Justice, Equality and Law Reform, Ireland, Attorney General, C-277/11, ECLI:EU:C:2012:744, pt. 82.
- 61. CJUE, Arrêt du 22 novembre 2012, M. M. contre Minister for Justice, Equality and Law Reform, Ireland, Attorney General, C-277/11, ECLI:EU:C:2012:744, pt. 86-88.
- 62. CJUE, Arrêt du 26 juillet 2017, Moussa Sacko contre Commissione Territoriale per il riconoscimento della protezione internazionale di Milano, C-348/16, ECLI:EU:C:2017:591.
- 63. CJUE, Arrêt du 4 octobre 2024, AH, FN contre Bundesamt für Fremdenwesen und Asyl, Aff. jointes C-608/22 et C-609/22, ECLI:EU:C:2024:828, pt. 54.
- 64. CJUE, Arrêt du 4 octobre 2024, AH, FN contre Bundesamt für Fremdenwesen und Asyl, Aff. jointes C-608/22 et C-609/22, ECLI:EU:C:2024:828, pt. 57.
- 65. CJUE, Arrêt du 4 octobre 2024, AH, FN contre Bundesamt für Fremdenwesen und Asyl, Aff. jointes C-608/22 et C-609/22, ECLI:EU:C:2024:828, pt. 56.
- 66. CJUE, Arrêt du 4 octobre 2024, AH, FN contre Bundesamt für Fremdenwesen und Asyl, Aff. jointes C-608/22 et C-609/22, ECLI:EU:C:2024:828, pt. 53.
- 67. CJUE, Arrêt du 13 juin 2024, SN, LN contre Zamestnik-predsedatel na Darzhavna agentsia za bezhantsite, C-563/22, ECLI:EU:C:2024:494, pt. 53-55.
- 68. CJUE, Arrêt du 22 novembre 2012, M. M. contre Minister for Justice, Equality and Law Reform, Ireland, Attorney General, C-277/11, ECLI:EU:C:2012:744, pt. 66.
- 69. CEDH, déc.,13 novembre 2014, H. et J. c. Pays-Bas, req. n°. 978/09, 992/09.
- 70. CEDH, déc., 13 novembre 2014, H. et J. c. Pays-Bas, req. n°. 978/09, 992/09, pt. 3-46.
- 71. CEDH, déc., 13 novembre 2014, H. et J. c. Pays-Bas, req. n°. 978/09, 992/09, pt. 75.
- 72. CEDH, déc., 13 novembre 2014, H. et J. c. Pays-Bas, req. n°. 978/09, 992/09, pt. 77.
- 73. CEDH, déc., 13 novembre 2014, H. et J. c. Pays-Bas, req. n°. 978/09, 992/09, pt. 78.
- 74. CEDH, Grande Chambre, 23 mars 2016, F.G. c. Suède, req. n°. 43611/11.
- 75. CEDH, Grande Chambre, 23 mars 2016, F.G. c. Suède, req. n°. 43611/11, pt. 82.
- 76. CEDH, Grande Chambre, 23 mars 2016, F.G. c. Suède, req. n°. 43611/11, pt. 10-37.
- 77. CEDH, Grande Chambre, 23 mars 2016, F.G. c. Suède, req. n°. 43611/11, pt. 125.
- 78. CEDH, Grande Chambre, 23 mars 2016, F.G. c. Suède, req. n°. 43611/11, pt. 126.
- 79. CEDH, Grande Chambre, 23 mars 2016, F.G. c. Suède, req. n°. 43611/11, pt. 127.
- 80. CEDH, 26 avril 2022, M.A.M. c. Suède, req. no 29386/20.
- 81. CEDH, 26 avril 2022, M.A.M. c. Suède, req. no 29386/20, pt. 71, 74.
- 82. CEDH, 26 avril 2022, M.A.M. c. Suède, req. no 29386/20, pt. 79. La Cour a statué : « De plus, le Tribunal administratif fédéral s’est livré à un examen approfondi de la situation des chrétiens au Pakistan, mais non suffisamment approfondi de la situation des convertis au christianisme et de la situation personnelle du requérant concernant sa conversion, le sérieux de ses convictions, sa manière de manifester sa foi chrétienne en Suisse, la façon dont il entendait la manifester au Pakistan si la décision d’éloignement était mise en œuvre, la connaissance de sa conversion par sa famille et sa vulnérabilité à des persécutions et à des accusations de blasphème. Les autorités suisses n’ont donc pas suffisamment évalué le risque que le requérant courrait, du fait de sa conversion, en cas de retour au Pakistan, pour confirmer le rejet de sa demande d’asile sachant qu’il n’était pas représenté par un avocat au cours de toute la procédure nationale. »
- 83. TSEVAS (Christos), « Religious Conversion, Asylum Law and the ECtHR Case-Law: M.A.M. v. Switzerland », Strasbourg Observers, 21 juin 2022.
- 84. CEDH, Grande Chambre, 23 août 2016, J.K. et autres c. Suède, req. n°. 59166/12.
- 85. CEDH, Grande Chambre, 23 août 2016, J.K. et autres c. Suède, req. n°. 59166/12, pt. 87.
- 86. CEDH, Grande Chambre, 23 août 2016, J.K. et autres c. Suède, req. n°. 59166/12, pt. 92.
- 87. CEDH, Grande Chambre, 23 août 2016, J.K. et autres c. Suède, req. n°. 59166/12, pt. 96-97.